du VERGIER de la ROCHEJAQUELEIN Henri
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Henri du VERGIER de la ROCHEJAQUELEIN
Titres: Comte de la Rochejaquelein Soldat vendéen
- Baptisé le 30 août 1772 - Saint Aubin de Baubigné, 79, , , La durbelière
- Décédé le 28 janvier 1794 - Saint Aubin de Baubigné 49, , , , à l’âge de peut-être 21 ans
- Inhumé en 1816 - Saint Aubin de Baubigné, 79, , , En l'église
Baptême: « Le trente du mois d'août est né et a
été baptisé Henry, fils légitime de haut
et puissant seigneur Henry-Louis-Auguste
du Vergier, chevalier, écuyer,
marquis de La Rochejaquelein, gueydon
des gendarmes, et de haute et puissante
dame Constance-Luçie-Bonne de Caumont,
qui a été tenu sur les fonts du
baptême par M. Jacques - Christophe-
Félix Boutillier, au lieu et place de haut
et puissant seigneur Armand - Henry -
Hercule de Caumont, capitaine du régiment
du Roy-infanterie, et par Mlle Marie-
Jeanne Le Clerc, au lieu et place de
haute et puissante dame Hardouïne-
Henriette Sidrac de Granges de Surgères,
douairière et marquise de La Rochejaquelein.
BOUTILLIER DE BEAUREGARD ;
LE CLERC; A. H. DU VERGIER;
S. M. A. DU VERGIER;
LA CASSAGNE SAINT-LAURENT;
F. THO. O. HANNIN,
rel- prêtre ; BRETHE, curé de
Saint-Aubin-de-Baubigné. »
-
Biographie : Au sortir de Sorèze, à treize ans, il sert à Royal-Pologne-Cavalerie "acheté par son père l'année précédente". En 1791 il refuse à prêter le serment prescrit aux officiers par l'Assemblée Constituante et démissionne. Peu après, le jeune Henri entre dans la garde Constitutionnelle du Roi. Au Dix Août, il fait le coup de feu contre les émeutiers, échappe au massacre, se cache à Paris, puis prend la route du logis paternel. Après le Dix Août, il alla rejoindre au château de Clisson, près de Bressuire, son cousin le marquis de Lescure.
Saint-Aubin-de-Baubigné
lire la suite sur le site de Sorèze
Il n'était encore qu'un adolescent de vingt ans, sous-lieutenant de cavalerie, lorsqu'il prit les armes (avril 1793). Devant plusieurs milliers de paysans réunis dans la grande cour de la Durbelière, il prononça les fameuses paroles : "Si j'avance, suivez-moi ! Si je recule, tuez-moi ! Si je meurs, vengez-moi !". Toujours au premier rang, dans toutes les batailles, ce jeune général au visage d'archange était le plus populaire des chefs vendéens. Après le passage de la Loire, désigné comme généralissime, il sut, pendant la terrible "Virée de Galerne", remporter d'éclatantes victoires et tenir tête inlassablement à des adversaires acharnés.
Rentré dans les Mauges, il fut tué le 28 janvier 1794, au cours d'une obscure escarmouche près de Cholet, à Nuaillé : Un soldat bleu reconnaît son écharpe blanche de général et lui tire une balle en pleine tête. La Rochejaquelein meurt sur le coup, il n'a pas 22 ans. Sa mort va rester secrète quelques temps, pour ne pas démoraliser les troupes et ne pas réjouir les républicains. Son corps est caché et ne sera retrouvé que sous la Restauration. La dépouille du généralissime repose depuis dans l'église de Saint-Aubin-de-Baubigné, sa ville natale.
Ancien élève de Sorèze.
Sources:
- personne: CB du Coudert (web), J-P de Palmas (site de l'Ecole de Sorèze)
- enterrement: Hervé Balestrieri (Site Web http://gvendee.free.fr/ ) 11.05.2007
Les stations du pèlerin à Saint-Aubin-de-
Baubigné. — Le tombeau de Monsieur
Henri. — Le secret de la première sépulture—
Comment le corps du héros échappa
aux profanations des Républicains, et
comment il fut retrouvé vingt-deux ans
plus tard. — L'exhumation du 38 mars
1816. — Curieux procès-verbal. — L'inhumation
définitive du 7 mai 1817.- Avant de poursuivre notre pèlerinage
et de passer à une nouvelle étape, il
dans le bourg même de Saint-Aubin-de-
Baubigné : la première, à l'église, devant
le tombeau de Monsieur Henri; l'autre,
tout à côté, devant la statue récemment
élevée à la mémoire du héros.
Commençons par le tombeau.
Il se trouve dans l'une des deux chapelles
latérales qui forment la croix de
l'église. Cette chapelle (celle du côté de
l'évangile) est d'une grande richesse ;
toutes ses peintures sont à fresque, et
elle est éclairée par un magnifique vitrail
représentant la mort de Judas Macliabée
: allusion suggestive et bien naturelle,
en face des restes mortels d'un
généralissime vendéen.
En avant du mausolée s'élèvent deux
gigantesques candélabres, ornés de
sculptures représentant les médaillons
de Henri de la Rochejaquelein, de son
frère Louis et de Lescure. Mausolée et
candélabres sont en marbre blanc.
C'est devant ce monument que, le 26
septembre 1895, Mgr de Cabrieres, évêque
de Montpellier, prononça le panégyrique
de Monsieur Henri, en présence
d'un auditoire composé de plus de trois
cents prêtres et de l'élite de la Vendée;
Panégyrique de superbe envolée, page
historique précieuse qui mérite d'être recueillie
dans nos archives et que je me
réserve de reproduire en appendice,
avant de clore le compte-rendu de mon
pèlerinage au pays poitevin.
En attendant, racontons à la suite de
quelles péripéties furent retrouvés et
transportés dans l'église de Saint-Aubin
les restes glorieux du généralissime de
la Grande Armée.»
Lorsque le héros eut été tué, le 28
janvier 1794, dans une escarmouche aux
environs de Nuaillé, Stofflet, accouru
aussitôt sur les lieux, ordonna aux quelques
Vendéens qui étaient présents de
garder le plus longtemps possible le
secret de ce malheur, afin de ne point
décourager l'armée; puis, pour soustraire
les restes du général aux profanations
des Bleus, il fit transporter et enterrer
le corps à quelque distance de là,
près de la métairie de la Haie-Burçau, située
sur le territoire de la commune de
Cholet.
La précaution n'était point inutile, car
voici ce que Turreau, dans une lettre
datée du 13 février 1794 Savary, t. III,
p. 192), écrivait au Comité de salut
public : •
« Le général Cordellier, qui commande
une des colonnes agissantes et qui t
battu l'ennemi à Cholet, a l'ordre dt
le poursuivre sans relâche. Il me mande
que la Rochejaquelein est tué et enterré,
à Trémentines. Trente rapports me sont
faits sur cet événement et tous s'accordent....
J'ai ordonné à Cordellier de
faire déterrer La Rochejaquelein et d'acquérir
des preuves de sa mort. » - Avant de poursuivre notre pèlerinage
- Sur la foi des trente rapports faits à
Turreau, les recherches des Républicains
s'égarèrent heureusement du côté
de Trémentines. Le secret de la sépulture
avait été si bien gardé que les Vendéens eux-mêmes, à l'exception de Stofflet
et des quelques témoins présenta
ignorèrent toujours, jusqu'à la fin de
la guerre, l'endroit où reposait le corps
de Monsieur Henri.
Vingt-deux ans plus tard, au mois de
mars 1816, Mu° Louise de la Rochejaquelein
, soeur du glorieux généralissime,
voulut faire exhumer les restes de son
frère. Aidée du maire de Cholet, M. Turpault,
elle dirigea elle-même les recherche.-
et le corps fut retrouvé non sans
peine, dans les conditions que constate
le curieux procès-verbal que voici :
« Le vingt-huitième jour de mars mil
huit cent seize, nous Denis Hocbocq,
docteur-médecin à Cholet; Pierre-Germain
Chenay, chirurgien à Nueil; Louis-
Jean-Baptiste-Etienne Baguenier-Pésormeaux,
chirurgien à Maulévrier, tous les
deux chirurgiens-majors des armées royales
de Ia Vendée, et René-Jean Terrien,
chirurgien à Trémentines, requis
par Mademoiselle Louise du Vergier de
la Rochejaquelein, soeur de Monsieur
Henri du Vergier de la Rochejaquelein,
généralissime et commandant en chef
l'armée royale de la Vendée, dite la
Grande Armée, nous sommes transportés
à la métairie de la Haie-Bureau, commune
de Cholet, à l'effet de procéder à
l'exhumation des restes de Monsieur
Henri du Vergier de la Rochejaquelein,
tué à l'âge de 21 ans, l e . . . février (28
janvier) 1794..., d'après l'autorisation
de Monsieur le Préfet du département de
Maine-et-Loire, contenue sur un arrêté
du 6 février 1816, et ce, en présence de
Monsieur François-Joseph-Paul Turpault,
maire de la dite commune de
Cholet.
» Pour parvenir à découvrir le lieu
où a été inhumé mon dit sieur de Ia
Rochejaquelein, M. le maire de Cholet
a entendu les déclarations des différents
témoins qui ont eu connaissance des
circonstances de la mort et de l'inhumation,
» Le premier témoin, nommée Perrine
Bernier, veuve Roution, demeurant à la
métairie de la Boulinière, commune de
Cholet, a dit qu'au moment du combat
qui eut lieu le... février (28 janvier) 1794,
près de Ia métairie de la Haie Bureau,
elle se trouvait à la dite métairie de Ia
Boulinière d'où elle a vu très distinctement
l'avant-garde à cheval des Royalistes
s'avancer par le champ des Trembles
; qu'au même instant elle a entendu
plusieurs coups de fusil et qu'alors l'infanterie
royaliste était à la métairie de
la Brissonnière. Elle déclare en outre
que feu Pierre Bernier, son frère, lui a
assuré que Monsieur Henri de la Rochejacquelein
avait été tué au moment même
où elle avait vu les Royalistes dans Ies
positions ci-dessus désignées et où elle
avait entendu des coups de fusil. Laquelle
déclaration elle a signé après lecture
faite.
» La déclaration ci-dessus a été confirmée
par celle de Marie Mosset, veuve
de Pierre Bernier, à qui son mari avait
fait le même rapport qu'à Perrine Bernier.
» Le second témoin, nommé Louis
Fortin, métayer au Bois d'Ouin, commune
de Cholet, a déclaré que, peu
de jours après le... février (28 janvier
1794), Ie général Stofflet lui avait dit
avoir fait enterrer Monsieur Henri de la
Rochejaquelein; que Grégoire, domestique
de M. Stofflet, lui avait assuré, quelque
temps après, qu'il avait été enterré
auprès de plusieurs cerisiers près la
Haie-Bureau, ce que ledit Fortin a entendu
répéter par beaucoup de personnes;
qu'il a souvent entendu dire que M.
Henri de la Rochejaquelein avait reçu
une balle dans le visage. Ledit Fortin
a déclaré ne savoir signer.
» Joseph Rotureau, métayer de la
Haie-Bureau, a indiqué l'endroit où il
a abattu les cerisiers dont a parlé Fortin
et qui existaient en 1794, ainsi qu'un
poirier au pied duquel il était de notoriété
publique que s'était faite l'inhumation
du corps de Monsieur Henri de
la Rochejaquelein.
» Monsieur Chenay, chirurgien susdit
déclare que le jour du décès de Monsieur
Henri du Vergier de la Rochejaquelein, - il recueillit des dépositions de plusieurs
témoins oculaires qui attestèrent
que M. de la Rochejaquelein avait reçu
la blessure dont il est mort dans la tête;
que la balle était entrée par l'oeil
et avait défoncé le crâne.
» D'après les déclarations ci-dessus et
d'autres concordantes, nous médecin et
chirurgien susdits avons fait faire des
fouilles dans les endroits indiqués,, afin
de parvenir à l'exhumation dont il s'agit,
et après plusieurs recherches nous avons
trouvé une tête à laquelle nous avons
remarqué deux fractures qui nous ont
paru avoir été faites par une arme à feu :
la première à la fosse orbitaire droite
avec brisure de l'apophyse montante de
l'os maxillaire supérieur du même côté,
la seconde vers le milieu du pariétal
droit, dont la table externe a été emportée
; passant ensuite à l'examen des
autres os, nous avons reconnu deux fémurs
dont les apophyses sont détruites,
un des os des iles du côté gauche, deux
humérus dont un est entièrement dépourvu
de ses apophyses et dont l'autre
a conservé seulement sa tête, plusieurs
fragments des côtes du côté gauche, un
péroné, une portion de l'os sacrum et
plusieurs autres petits os qu'il est impossible
d'énumérer. Tous ces os ont été
considérablement altérés, ce qui empêche
de déterminer la stature de l'individu.
Néanmoins, nous avons remarqué que
ces os devaient appartenir à un jeune
homme d'une taille élevée, à raison de
leur longueur et du défaut de consistance.
» Les déclarations des témoins sur
la blessure qu'a reçue Monsieur Henri
du Vergier de La Rochejaquelein, desquelles
il résulte que la balle était entrée
par l'oeil et l'état de la tête que nous
avons exhumée qui est fracturée précisément
à la fosse orbitaire, prouvent
clairement que les ossements exhumés
sont ceux de mon dit sieur Henri de la
Rochejaquelein, En conséquence nous
avons fait placer ces ossements dans une
bière que nous avons fait transporter
dans l'église de Saint-Pierre de Cholet,
sous l'autel de Saint-Sébastien, ce jourd'hui
à une heure après-midi.
» Le transport a eu lieu sous l'escorte
d'un détachement de Vendéens qui se
sont présentés spontanément à cet effet.
Le convoi a été reçu à l'entrée de la ville
avec les cérémonies d'usage, par le
clergé réuni, et M. le Maire de Cholet, à
la fin de la cérémonie, a apposé les
scellés sur la bière, avec le cachet de la
mairie sur cire noire.
» De quoi nous avons rédigé le présent
procès-verbal que nous avons signé,
ainsi que M. le Maire de Cholet, le tout
en présence de Mademoiselle Louise du
Vergier de La Rochejaquelein.
» Fait à Cholet les jour et an que
dessus,
» HOCBOCQ; BAGUENIER-DESORMEAUX
; TERRIEN ;
CHENAY ; RAIMBAULT,
principal du collège; Pierre
BOUSSION, ex-commandant
déplace; ROUSSELOT
; BEURIER, curé de
Cholet ; Louise de La ROCHEJAQUELEIN; TURPAULT,
fils aîné', maire. »
Les précieux restes de Monsieur Henri
n'avaient été déposés dans l'église de
Saint-Pierre de Cholet qu'à titre provisoire
: l'année suivante, le 7 mai, après
un service funèbre auquel assistait une
foule nombreuse de Vendéens, ils furent
solennellement transportés dans l'église
de Saint-Aubin-de-Baubigné, où la Marquise
de la Rochejaquelein avait tenu à
les réunir à ceux de son mari, tué en
1815 au combat des Mathes.
C'est là, dans l'église paroissiale du
château paternel, que les deux frères
dorment leur dernier sommeil dans le
même tombeau, en attendant le jour glorieux
de la résurrection.
Le château de Ia Durbelière
Une poignée de remerciements en guise de
préface à cette quatrième série. — La
Vendée Historique au tribunal de Ia critique.—
Une vengeance de Dom Chamard.
— Pourquoi l'auteur a fait attendre quelque
peu la suite des Zig-Zags au Pays des
Géants. — En route pour le pays de La
Rochejaquelein ! — Au quartier général
de Châtillon. — Mon cicérone au berceau
de Monsieur Henri. — Un premier document
: le portail de la Durbelière. —
— L'écusson et les titres des Rorthais. —
Les ruines de la Durbelière. — La tour
où naquit le Bayard de la Vendée militaire.
— La chapelle, — Où l'auteur a
éprouvé qu'il subsiste quelque chose des
héros aux lieux habités par eux. — Vision
devant le seuil d'une porte.
L'accueil fait aux trois premières séries
de ces chroniques m'impose l'obligation
de ne point aborder la quatrième
sans avoir adressé de vifs remerciements :
non pas seulement à la fidèle clientèle
de la Vendée Historique ainsi qu'à la
presse locale et régionale, mais encore
aux maîtres critiques qui ont si aimablement
profité du compte rendu de mes
petits volumes pour faire connaître au
loin la Revue vendéenne.
Déjà, au suffrage si précieux de M.
Edmond Biré était venu s'ajouter celui
du critique autorisé de la Vérité Française
et du Bloc Catholique, M. Edouard
Pontal, de l'école des Chartes : « De
toutes les Revues provinciales », écrivait-
il, au mois de mai dernier, en présentant
la Vendée Historique aux lecteurs
du Bloc Catholique, « de toutes les
Revues provinciales, je n'en connais aucune
qui soit plus intéressante, plus vivante
et plus vaillante. Ce n'est pas seulement
en Vendée, mais partout qu'il
faudrait la lire. »
Et voici qu'à leur tour se présentent,
de toutes part, d'autres parrains non
moins aimables, qui tiennent à
plus spécialement leurs dragées aux
humbles petits Zig-Zags .,
Merci à tous, notamment à M. Maxime
de la Rocheterie, pour ses deux
coups de clairon successifs dans le grave
orchestre du Polybiblion i Merci surtout
à ce vénérable Dom Chamard auquel —
Dieu me pardonne I — j'avais négligé
d'adresser mes deux premiers petits volumes
; qui a été obligé de me les réclamer
et qui — pour... se venger de mon
inexcusable négligence — a tout simplement
fait insérer ce qui suit dans le
Bulletin des Bénédictins de Ligugé :
c.. Nous avons, eii ces deux plaquettes
(les deux premiers volumes des Zig-
Zags), neuf monographies vendéennes,
toutes d'un intérêt très vif et de la meilleure
érudition Il faut féliciter M.
Henri Bourgeois de la vaillance qu'il met
amener à bien sa patriotique tâche. C'est
une bonne et sainte action que de recueillir
ainsi — pour l'avenir — les souvenirs
épars de notre glorieux passé,
d'autant que l'auteur apporte dans le
choix de ses documents toute la rigueur
de la plus sévère critique. Nous regrettons
seulement le tirage restreint de ces
savantes brochures... »
De pareils témoignages — je ne m'en
cacherai pas — m'ont vivement touché ;
et ils m'expliquent comment une petite
Revue aux allures tout à fait sans façon,
et qui s'adressait surtout aux humbles
fidèles de la Vendée, a pu si rapidement
étendre sa clientèle dans nombre de
provinces et pénétrer, peu à peu, jusque
dans les milieux cultivés où elle compte
aujourd'hui tant de lecteurs.
j'en ai conclu que la note imprimée à
la Vendée Historique n'était réellement
pas trop mauvaise ; que la tournure populaire
donnée à mes petites chroniques
n'était point si démodée que certains
pseudo - documentaires avaient semblé
l'insinuer; que le fond et la forme comptaient,
somme toute, plus d'approbateurs
autorisés que de détracteurs pé»
$Wt?. n < et jaloux; que le meilleur pro«
cédé pour conquérir le public était encore
— même aujourd'hui ! — de rejeter
l'apparat de la fausse science et de se
garder des obscurités du pédantisme, en
se mettant tout simplement — à la bonne
franquette — à la portée du plus humble
de ses lecteurs; qu'en un mot, les routes
bien déblayées et même fleuries, suivant
l'heureuse expression de Châteaubriand,
conduisant non moins sûrement et beaucoup
plus agréablement le voyageur au
but que les sentiers embroussaillés et rocailleux,
je n'avais qu'à m'en tenir à la
méthode jusque-là suivie, et à poursuivre
du même pas mon petit bonhomme de
chemin.
Mais les suffrages du public né doivent
pas avoir seulement pour effet
de procurer une douce satisfaction à
l'ouvrier en cours de besogne : pour être
mérités par lui jusqu'au bout, ils doivent
piquer son amour-propre; ils lui imposent
l'obligation de perfectionner l'oeuvre
de plus en plus, ou, tout au moins,
de donner le même fini aux parties encore
sur le chantier. — Ce sera mon
excuse, si j'ai fait attendre quelque peu
cette quatrième série.
Au moment, en effet, où, quittant-le
pays de Lescure pour celui de La Rochejaquelein,
j'allais conduire le lecteur à la
Durbelière et à Saint-Aubin-de-Baubigné,
je fus tout à coup pris d'un scrupule :
Avais-je bien suffisamment étudié
les lieux et passé à la loupe — sur place
— ces documents « de la plus sévère critique
» dont la Revue bénédictine me félicitait
d'avoir jusque-là fait usage.... ?
Ma première visite à la Durbelière et à
Saint-Aubin-de-Baubigné datait déjà de
bien loin! Elle avait été, d'ailleurs,
quelque peu superficielle, et plutôt celle
d'un simple curieux que d'un historien :
avant de prendre la plume n'était-il pas
prudent de retourner là-bas, pour compléter
mes notes et rafraîchir mes souvenirs?...
Poser la question, c'était la réioudïe |
et au risque de faire jurer le lecteur impatient,
je me décidai à ne reprendre la
suite de mes impressions de voyage au
Pays des Géants qu'après une « descente
de lieux » complémentaire. J'attendis
donc les premiers beaux jours, et, dès
que je pus disposer de quarante-huit
heures entre deux numéros de la Vendée
Historique^ je me mis en route pour
Châtillon : quartier général où je n'ai
que l'embarras du choix pour planter
ma tente, lors de chaque campagne entreprise
au pays poitevin.
La première fois, c'était chez un vieux
camarade du pensionnat des bons Frères
de Saint-Laurent, M. Ludovic Couronneau,
que j'avais trouvé la popote au
retour de chaque étape : l'autre jour, ce
fut à la porte d'un fidèle de la Vendée
Historique, M. Blanleuil, que j'allai frapper
sans façon pour demander l'hospitalité.
Guide non moins précieux qu'hôte
aimable, M. Blanloeil, qui connaît tous les
coins et recoins de la contrée, poussa
l'obligeance jusqu'à vouloir me piloter
lui-même, et ce fut en sa compagnie — et
sous sa direction — que s'accomplit le
pieux pèlerinage dont je vais rendre
compte.
»
Donc, l'autre matin, avec M. Blanloeil
comme cicérone me voilà parti de Châtillon,
au lever du soleil, à destination
de la Durbelière.
. Pedibus cumjambis — naturellement.,,
Ce n'était point en auto, ni même en
voiture que les gas de la Grand'Guerre
faisaient là navette dans ces parages, et
j'aurais rougi de me montrer plus difficile
qu'eux. D'autant qu'il s'agissait à peine
d'une course de onze kilomètres, aller et
retour : plutôt une simple promenade.
A une lieue de Châtillon, voici le
bourg de Saint-Aubin-de-Baubigné;
nous le réservons pour le retour et courons
droit à la Durbelière, premier but
du pèlerinage. En toute chose il faut
commencer par le commencement j o.-,
U Durbelière fut le berceau de La Rochejaquelein, et ce fut là que Ie héros
vint prendre Ie commandement des vaillants
Poitevins insurgés : ma première
station devait donc être aux lieux témoins
de la naissance et de la vocation
de Monsieur Henri.
Le château de Ia Durbelière, dépendant
de la commune de Saint-Aubin-de-
Baubigné, est situé à environ douze
cents mètres du bourg, à gauche de la
route de Châtillon aux Aubiers. Quand
je dis le château, c'est une façon de
parler, car il n'en reste plus que des
ruines, à l'exception des servitudes —
trè9 bien conservées — au milieu desquelles
se trouve le vaste portail donnant
accès dans l'ancienne enceinte seigneuriale.
Arrêtons-nous un instant en face de ce
portail : il va nous fournir, on peut dire
qu'il constitue lui-même un premier et
précieux document. C'est le même, en
effet, qui existait en 1793; on l'a religieusement
conservé tel quel, brisé dans
la partie inférieure par les Bleus, à
coups de haches dont il est facile de
constater la trace.
A gauche de ce témoin vénérable, et
au-dessus d'une petite porte latérale, se
trouvent sculptées dans la pierre les
armes des Rorthais, telles qu'elles furent
concédées par saint Louis à Guillaume
de Rorthais, l'un des héros de la
fameuse bataille de Mansourah.
Ces Rorthais, qui, on le voit, remontaient
bien réellement aux croisades,
avaient été en effet les premiers seigneurs
de la Durbelière, qu'ils possédaient
encore au commencement du dix-septième
siècle. A cette époque, Renée
de Rorthais, fille de François, apporta le
château en dot à son cousin Pierre de
Meulles, et ce fut seulement près d'un
siècle plus tard qu'un petit-fils de Renée
de Rorthais ayant épousé Marie du Vergier
de la Rochejaquelein, cette alliance
fit passer la Durbelière dans la famille
du futur généralissime vendéen.
La famille dci Moulte» est éteinte fo-,
puis longtemps, et le dernier Marquis de
la Rochejaquelein est lui-même descendu
dans. la tombe ; mais les Rorthais, doublement
vendéens depuis leur transplantation
au château de la Rochette en Bas-
Poitou, ont toujours des représentants,
— dignes du grand nom immortalisé par
Monsieur Henri, le glorieux allié de
leur famille. J'ajoute que les Rorthais
eux - mêmes s'illustrèrent pendant la
Grande Guerre, et que plusieurs ont payé
de leur sang le droit de figurer au livre
d'or de la Vendée.
Après avoir noté ces menus détails
préliminaires, et maintenant que nous
connaissons ce que j'appellerai les antécédents
de la Durbelière, franchissons
l'antique portail, traversons l'immense
cour autour de laquelle s'élèvent les servitudes,
et dirigeons-nous là-bas, en
face des douves, vers la petite maison
d'habitation ménagée au régisseur, M. Ouvrard.
Ce vieux serviteur des. La Rochejaquelein,
auquel mon aimable guide
vient de passer la main, va nous faire
visiter lui-même — en cicérone « de derrière
les fagots » — les ruines du château
proprement dit.
*
. *
Si j'étais peintre, comme il me semble
que je le brosserais « de chic », le tableau
de ces ruines imposantes, témoins
et dépositaires de tant de glorieux souvenirs!...
Si j'étais antiquaire de profession,
avec quel soin jaloux, avec quelle scrupuleuse
minutie je passerais à la loupe
chaque fronton, chaque sculpture,
chaque pierre de cette colossale et vénérable
masure, qui fut le berceau d'un
héros pour lequel Homère eût donné
tous les demi-dieux et même les dieux
complets de l'Iliade et de l'Odyssée !
Malheureusement, je ne suis ni peintre
ni antiquaire : en fait de pinceau je n'ai
jamais manié que la plume ; en fait de
passion pour les pierres et les débris des
vieux murs je n'y vois pas plus loin que
U, 4e Mandat-Grancey et j'appartiens,
HISTORIQUE 41Î5
- — - ^ - — - - - * - — . « - « « « - » * « .
comme lui, « à la catégorie des touristes
qui ne s'intéressent guère aux monuments
qu'à cause des souvenirs qu'ils
rappellent. » Les secrets de la peinture
et de l'archéologie proprement dite me
sont tout aussi inconnus que ceux de la
numismatique ou de l'hébreu, et je me
garderai bien de mettre seulement le
bout de l'orteil sur l'un quelconque de
ces terrains : j'aurais trop peur de m'y
enfoncer jusqu'au cou !
Je dirai donc tout bonnement aux disciples
de Raphaël...ou d'Oldbuck: «Faites
comme moi, et allez-y voir. Les profits
du voyage en valent la peine, car il faudrait
n'être qu'un misérable barbouilleur
de quatre sous — ou un antiquaire de
bien mince pacotille — pour s'en retourner
sans inspiration ou à vide de trouvailles,
après une excursion aux ruines
de la Durbelière ! » Quant à moi, simple
enquêteur à la recherche des leçons
morales du passé, je me suis contenté
d'admirer l'ensemble de ces ruines, en
notant seulement les parties qui m'ont
rappelé quelque épisode de la vie de
Monsieur Henri.
J'en signalerai trois :
Tout d'abord, à gauche, la tour, où la
tradition rapporte que naquit le Bayard
de la Vendée militaire, à la date du 30
août 1772. Retenons bien cette date :
aucune, peut-être, ne mérite mieux de figurer
aux éphémérides vendéennes. J'en
puis d'ailleurs garantir l'exactitude,
grâce au document suivant, extrait des
registres paroissiaux de Saint-Aubin-de-
Baubigné pour l'année 1772 :
« Le trente du mois d'août est né et a
été baptisé Henry, fils légitime de haut
et puissant seigneur Henry-Louis-Auguste
du Vergier, chevalier, écuyer,
marquis de La Rochejaquelein, gueydon
des gendarmes, et de haute et puissante
dame Constance-Luçie-Bonne de Caumont,
qui a été tenu sur les fonts du
baptême par M. Jacques - Christophe-
Félix Boutillier, au lieu et place de haut
4-7 --- VENDÉE
et puissant seigneur Armand - Henry -
Hercule de Caumont, capitaine du régiment
du Roy-infanterie, et par M110 Marie-
Jeanne Le Clerc, au lieu et place de
haute et puissante dame Hardouïne-
Henriette Sidrac de Granges de Surgères,
douairière et marquise de La Rochejaquelein.
» BOUTILLIER DE BEAUREGARD ;
LE CLERC; A. H. DU VERGIER;
S. M. A. DU VERGIER;
LA CASSAGNE SAINT-LAURENT;
F. THO. O. HANNIN,
rel- prêtre ; BRETHE, curé de
Saint-Aubin-de-Baubigné. »
A droite, dans Ie corps principal des
ruines, voici la chapelle. C'est là, très
vraisemblablement, que fut baptisé le
héros ; c'est là, à coup sûr, que sa pieuse
mère lui apprit à joindre les mains et à
prier Dieu; c'est là, enfin, que ce fils des
croisés dut venir s'agenouiller une dernière
fois, dans la matinée du 13 avril
1793, lorsqu'il prit la croix à son tour
pour foncer sur la «chiennaille» républicaine.
Et maintenant, regardez en face de
vous, au centre des ruines... Voyez-vous
cette porte, dont les montants bravent
les années après avoir bravé le feu des
Bleus, et qui donne accès dans la cour
d'honneur ?... C'est bien la porte d'honneur
en effet, car ce fut là, sur ce seuil
où sont venus s'agenouiller, depuis, tant
de vétérans de la Grande Armée, ce fut
là que lé futur généralissime de vingt et
un ans, après avoir rangé autour de lui
les gas du pays de Saint-Aubin et de
Châtillon, prononça sa fameuse harangue,
la plus belle peut-être qui soit jamais
tombée de la bouche d'un guerrier!
Jamais je n'éprouvai, aussi bien qu'au
milieu de cette cour d'honneur de la
Durbelière, la vérité de ce que disait un
ancien : à savoir qu'aux lieux où ont habité
les grands hommes, quelque chose
d'eux-mêmes survit, au point de donner
parfois l'illusion de leur présence.
HISTORIQUE 418
Tout à l'heure, en pénétrant dans la
vieille tour, il m'avait déjà semblé voir
Ie héros dans ses langes, et même entendre
ses premiers vagissements de nouveau-
né. Dans la chapelle l'illusion avait
été encore plus forte, et j'aurais presque
parié que je l'avais là sous mes yeux,
ce bébé rose, émergeant d'un flot de dentelles
et souriant au prêtre qui le marquait
du signe du chrétien... Mais devant
cette porte, et à l'instant où j'allais
en franchir le seuil, ce fut tout à coup
l'illusion complète.... Instinctivement je
fermai les paupières, et alors, sur le fond
de cette chambre noire où chacun de
nous voit si bien en dedans, je vis se détacher
nettement la silhouette, non plus
d'un enfant au berceau, mais d'un grand et
beau jeune homme, fier, l'oeil étincelant; la
lèvre frémissante, le geste vainqueur....
Et, du coup, je n'aurais plus seulement
parié, j'aurais presque juré que j'entendais
réellement retentir à mes oreilles la
mémorable apostrophe :
Si j’avance, suives-moi ! Si je recule,
tuez-moi! Si je meurs, vengez-moi I
(A suivre.)
___. - wiki#Normal; Henri du Vergier, comte de La Rochejaquelein, né le 30 août 1772, à la Durbelière, près de Châtillon sur Sèvre (Poitou) et tué le 28 janvier 1794, à Nuaillé, est l'un des chefs de l'armée vendéenne au cours des batailles de la Révolution française.
Sommaire
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1 Biographie
1.1 Origine
1.2 Les premiers soulèvements
1.3 L'insurrection monarchiste
1.4 Soulèvement de la Vendée
1.5 Bataille de Cholet
1.6 Géné
1.7 L'expé
1.8 Bataille d'Entrammes
1.9 La Viré
1.10 La bataille du Mans
1.11 La retraite
1.12 La fin
1.13 La tombe
1.14 Le Héros de la Vendée
2 Notes et références
3 Source partielle
Biographie [modifier]
Origine [modifier]
Fils du marquis de La Rochejaquelein, Henri de La Rochejaquelein naquit au château de la Durbelière, commune de Saint-Aubin-de-Baubigné, près de Châtillon sur Sèvre (aujourd'hui Mauléon dans le département des Deux-Sèvres, et fit ses études à l'école militaire de Sorèze. La Révolution française l'ayant surpris dès l'âge de seize ans, il ne suivit point son père dans l'émigration, et il crut pouvoir défendre le trône dans la Garde constitutionnelle du Roi Louis XVI où il fut appelé en 1791. La journée du 10 août 1792 trompa ses espérances [1].
Les premiers soulèvements [modifier]
On le vit en effet, dans le Poitou, déplorer les suites du premier soulèvement de Bressuire, où les paysans royalistes venaient d'être défaits par les révolutionnaires. La Rochejaquelein se retira dans la terre de Clisson, près de Parthenay, chez le marquis de Lescure, son parent et son ami : unis tous deux par les mêmes sentiments, à peu près du même âge, ayant les mêmes intérêts, ils aspiraient secrètement au projet de participer au rétablissement de la monarchie qui menaçait ruine. Ils n'apprirent que par des bruits vagues le nouveau soulèvement du 10 mars 1793.
Statue de Henri de La Rochejaquelein au Muse des Augustins réalisé en 1895 par Alexandre Falguire
L'insurrection monarchiste [modifier]
Ils flottaient entre l'espérance et la crainte, lorsqu'un paysan de Châtillon vint annoncer à la Rochejaquelein que les habitants des paroisses circonvoisines, impatients de se réunir aux insurgés, couraient aux armes et le demandaient pour chef. [2] Lescure veut le suivre. C'était livrer ses parents, ses amis et sa jeune épouse à la vengeance des républicains.
Accompagné de son guide fidèle et armé de deux pistolets, la Rochejaquelein arrive sur le théâtre de la guerre et rejoint Bonchamps et d'Elbe. Il apprend qu'une division ennemie pénètre dans la Vende, et, n'écoutant que son courage, il veut arrêter le mouvement offensif des républicains, II accourt à Châtillon, à Saint-Aubin-de-Baubigné, où sont les propriétés de sa famille. À peine a-t-il paru que des milliers de paysans des Aubiers, de Neuil, de Saint-Aubin, des Echaubroignes, des Cerqueux de Maulévrier, d'Izernay, le proclament leur chef.
En mars 1793, il participe au soulèvement de la Vende et devient un des chefs de l'armée vendéenne. La Rochejaquelein se met à leur tête et leur adresse cette courte harangue :
« Si mon père était parmi nous, il vous inspirerait plus de confiance, car à peine me connaissez-vous. J'ai d'ailleurs contre moi et ma grande jeunesse et mon inexpérience ; mais je brûle déjà de me rendre digne de vous commander. Allons chercher l'ennemi : si j'avance, suivez-moi ; si je recule, tuez-moi ; si je meurs, vengez-moi. »
Soulèvement de la Vendée [modifier]
Henri de La Rochejaquelein au combat de Cholet, 17 octobre 1793, peinture de Paul-Émile Boutigny, Musée d'histoire de Cholet
Les Vendéens répondent par des acclamations et marchent aux républicains, qu'ils trouvent retranchés dans le cimetière des Aubiers. Ils investissent le bourg et attaquent en tirailleurs la division du général Pierre Quétineau. La Rochejaquelein les persuade que l'ennemi, à demi vaincu, commence à prendre la fuite. Aussitôt les Vendéens s'élancent sur les républicains, les dispersent et s'emparent de leur artillerie. La Rochejaquelein marche à l'instant sur Châtillon et sur Tiffauges. Là, se réunissant aux autres rassemblements royalistes, il partage avec eux les munitions qu'il vient d'enlever, et, par un premier succès, relevant son parti, il lui inspire une ardeur nouvelle. La défaite des Aubiers ayant décidé le général Quétineau à évacuer précipitamment Bressuire, le marquis de Lescure envoya l'ordre à plus de quarante paroisses de prendre les armes.[3] Le château de Clisson devint à l'instant une place d'armes et se remplit de soldats. Chaque rassemblement faisait un corps à part. Celui de la Rochejaquelein se réunit le plus souvent à la grande arme d'Anjou, qui, à cette époque, s'élevait à peine à 18 000 combattants, mal armés et sans organisation fixe.
Le 2 avril, La Rochejaquelein prit part au combat de Beaupréau, à la suite duquel les républicains, refoulés au delà de la Loire, restèrent pendant trois mois sans s'avancer dans le pays insurgé. La consternation se répandit à Angers, à Saumur et à Nantes. À l'attaque de Thouars, la Rochejaquelein, monté sur les épaules de Texier de Courlay, tire sur les assiégés, et tandis qu'on recharge ses armes, il arrache de ses mains les pierres des murailles et commence la brèche : toute l'armée républicaine mit bas les armes et se rendit à discrétion. À la Première Bataille de Fontenay-le-Comte, perdue par les royalistes, la Rochejaquelein commanda l'aile gauche. Peu de jours après, à la seconde bataille, il chargea avec la cavalerie, enfonça les bleus et acheva la déroute. À l'prise de Saumur, le 7 juin, il enleva d'abord le camp retranché de Varrins ; et emporté par sa bouillante ardeur, au moment où l'on se battait encore à l'entrée de la ville, il met le sabre à la main, sa carabine en bandoulière, et suivi d'un seul officier (La Ville-Baugé), il s'élance à la suite des fuyards, pénètre dans les rues, s'avance sur la place de la Bhilange, brave les coups de fusil, abat lui-même plusieurs soldats républicains et renverse à ses pieds, d'un coup de sabre, un dragon qui, arrivé sur lui le pistolet à la main, venait de le manquer.
La prise de Saumur fut l'exploit le plus étonnant des Vendéens. En cinq jours de combats, ils avaient fait plus de 12 000 prisonniers, pris pièces de canon, des munitions considérables et le chef de la Loire. [4]
Pendant le siège de Nantes, qui fut moins heureux, la Rochejaquelein garda Saumur avec sa division, tant pour couvrir la Vendée que pour conserver l'une des plus importantes communications de la Loire. Après l'échec de Nantes, il vola à la défense du pays insurgé, qui était attaqué de nouveau. Il commanda l'aile droite à la bataille de Luçon, et, couvrant la retraite, il préserva l'armée royale et sauva les troupes d'élite.
Cet échec fut réparé le 4 septembre, jour où l'armée républicaine de Luçon, assaillie dans son camp retranché de Chantonnay, fut entièrement détruite. La Rochejaquelein avait tourné lui-même le camp pour l'investir et commencer l'attaque. Vers cette époque, la convention nationale ayant voté contre la Vendée une guerre plus énergique, la lutte devint si terrible que tous les combats antérieurs semblèrent n'en avoir été que le prélude.
La Rochejaquelein, renforçant la division de sur Sèvre, emporta la position d'Erign. [5] La Vendée allait être en péril par la concentration des armées républicaines : la Rochejaquelein, Stofflet et Lescure couvrirent Châtillon, mais sans succès.
Bataille de Cholet [modifier]
Après la bataille de Cholet, où d'Elbée et Bonchamps succombèrent également, La Rochejaquelein était devenu le chef du parti royaliste. [6]
Le torrent des fuyards entraîna la Rochejaquelein jusqu'à Beaupréau. Devenu l'âme de son parti, ce jeune guerrier se vit engagé sous ces funestes auspices dans le passage de la Loire, qu'il désapprouvait. Sa première pensée fut de couvrir et d'assurer la retraite : il laissa d'abord une forte arrière-garde à Beaupréau, lui ordonna de se défendre et de se porter ensuite rapidement sur les bords du fleuve.
Le 18 octobre, 80 000 fugitifs avaient atteint Saint-Florent pour passer sur la rive droite. La Rochejaquelein et Lescure s'opposaient opiniâtrement à ce passage ou plutôt à cette fuite. La transmigration vendéenne fit renaître une armée royale qui, le 19 octobre, se trouva réunie tout entière à Varades, sur la rive droite.
Généralissime [modifier]
Les généraux, n'ayant plus ni Bonchamps ni d'Elbée, sentirent la nécessité de se donner un commandant en chef qui eût la confiance générale. Lescure, blessé à mort, désigna la Rochejaquelein comme le seul capable de ranimer le courage des combattants de la Vendée. Tous les chefs le nommèrent, à l'unanimité, généralissime. Il est nommé général en chef de l'armée vendéenne catholique et royale. Il avait à peine 21 ans [7].
L'expédition en marche [modifier]
Lorsque le plan de campagne eut été arrêté dans les conseils, que l'on se fut décidé à se porter sur d'abord sur Laval et sur Rennes, l'armée leva ses tentes. L'armée entière se mit en mouvement, le 20 octobre, pour une expédition sur les côtes de Bretagne, où les Anglais faisaient espérer des secours. Il fut décidé qu'on marcherait.
L'avant-garde était composée de 12 000 fantassins, soutenus de 12 pièces de canon, les meilleurs soldats et presque toute la cavalerie formaient l'arrière-garde ; entre ces deux corps cheminait un troupeau de femmes, d'enfants, de vieillards, qui s'élevait à plus de 50 000. [8]
La Rochejaquelein passa le gros des tirailleurs et deux pièces de canon en avant et les bagages au milieu de l'armée. Un corps républicain couvrait Laval. À huit heures du matin, le 22, le général en chef fit commencer l'attaque ; les républicains, ébranlés, furent bientôt entraînés par les fuyards ; la cavalerie vendéenne acheva de tout disperser.
Bataille d'Entrammes [modifier]
Article détaillé : Bataille d'Entrammes.
La Virée de Galerne [modifier]
Article détaillé : Vire de Galerne.
La Rochejaquelein, qui avait divisé son armée en trois corps, s'empara d'Ernée et de Fougères à la suite de deux attaques brillantes. Il prit ensuite la route de Dol au lieu de marcher sur Rennes. De Dol, il s'avança sur Pontorson et Avranches, afin de se porter sur Granville, que le gros de l'armée, formant à peu près 30 000 hommes, attaqua sans succès, la place étant hérissée de fortifications et défendue par une garnison exaltée et nombreuse. Les Vendéens, découragés, furent à la veille de se soulever contre leurs chefs ; demandant à grands cris à rentrer dans leur pays natal.
La Rochejaquelein rappela les détachements et se remit en marche. En s'éloignant du rivage, les royalistes perdirent à jamais l'occasion d'acquérir, par la jonction des forces anglaises avec eux, la consistance politique et militaire, qui pouvait les sauver. L'expédition que commandait lord Moira, contrariée par les vents, mit trop tard à la voile. Les distances, les éléments et la défense de Granville causèrent la ruine des royalistes.
Mais leur retraite jusqu'à la Loire fut marquée par des combats où éclatèrent de nouveau toute leur valeur et l'énergie de leurs chefs. Pontorson fut d'abord enlevé après un grand carnage. La Rochejaquelein, se dirigeant ensuite vers Dol, trouva sur les deux routes d'Antrain et de Pontorson deux armées républicaines qui marchaient à grandes journées pour lui couper la retraite. Il divise aussitôt ses forces pour faire face des deux côtés. Lui-même repousse d'abord Westermann sur Pontorson, tandis que sur la route d'Antrain d'autres chefs harcelaient diverses colonnes ennemies. On se battit pendant vingt-deux heures, du 16 au 17 novembre.
La Rochejaquelein, dont le cheval fut blessé, donna partout des preuves d'une haute valeur et fit surtout admirer ce coup d'oeil qui distingue les plus grands capitaines. Cette bataille ne peut se comparer qu'à celle de Laval. Les royalistes, réunis en masse, poursuivirent continuellement l'armée républicaine, la forçant sur tous les points à fuir dans le plus grand désordre.
Le 21 novembre, la Rochejaquelein occupa Ernée et le lendemain Mayenne, d'où il se dirigea sur Laval, Le 27, il sortit de Laval et marcha sur la Flèche, où il séjourna jusqu'au décembre. Le conseil vendéen y décida qu'on attaquerait Angers sans retard. L'attaque d'Angers, qui commença le 5, ne fut pas plus heureuse que celle de Granville. Les chefs, au désespoir de ce dernier échec et indécis sur leur marche, prirent la route du nord, tournant le dos à la Loire et n'osant rentrer dans la Vendée par les Ponts-de-Cé, dont les approches étaient défendues. L'armée royale se porta sur la Flèche par Baugé : arrivée devant la Flèche, elle trouva le pont sur la rivière du Loir coupé et la ville au delà défendue par une forte garnison. Placée ainsi entre la rivière et l'armée républicaine qui marchait pour la combattre de nouveau, sa position était effrayante. La Rochejaquelein prend alors un parti décisif : il remonte la rivière à la tête de cavaliers choisis, dont chacun portait un fantassin en croupe, et, trouvant un gué près d'un moulin, il passe le premier sur une chaussée couverte d'eau : le reste suit, surprend et culbute la garnison ; il s'empare du faubourg, s'y retranche et rétablit le pont. La ville est prise, et la Rochejaquelein, par son action d'éclat, sauve l'armée.
La bataille du Mans [modifier]
Le 10 décembre, il se remet en marche et s'avance vers le Mans, espérant y trouver des vivres et des amis ; car l'armée, accablée de privations, était aux abois. S'étant rendu maître du Mans, il y passa tranquillement la journée du 11 ; mais le lendemain il : fut attaqué sur les trois routes du sud par toutes les forces républicaines, qui avaient pour chef le général Marceau. On sait que la bataille du Mans, livrée le 13 décembre, fut en quelque sorte le tombeau de l'armée vendéenne. Là commença du moins sa dissolution. La Rochejaquelein, voyant la bataille perdue, s'était efforcé, pour éviter un massacre général, de mettre quelque ordre dans la retraite. Il rassembla le peu de cavaliers qu'il rencontra sur son passage et gagna la route de Laval, la seule qui fût encore libre, elle était couverte de fuyards ; il en rallia un assez grand nombre et pénétra le soir même dans Laval avec ces débris.
La retraite [modifier]
Le lendemain, il arrive à Craon avec sa troupe fugitive, que les républicains harcelaient et dont il pressait la retraite. Ses soldats, livrés à une sombre inquiétude, marchent nuit et jour, espérant traverser la Loire à Ancenis. Le 15, il occupe Pouancé et le lendemain Ancenis, où il entre le premier sans éprouver de résistance. Il n'y avait là ni bateaux ni pontons, et la rive opposée était au pouvoir de l'ennemi.
Sur l'autre rive, on aperçoit quatre barques chargées, dont on espérait s'emparer et se servir. La Rochejaquelein s'offre d'aller lui-même reconnaître l'autre rive. Il se jette, avec Stofflet et La Ville-Baugé, dans un batelet enlevé d'un étang voisin, et qu'on avait chargé sur un chariot. Toute l'avant-garde suit des yeux ce frêle bateau, portant la Rochejaquelein [9]. Une attaque subite des républicains force les Vendéens de renoncer à leur entreprise. On vit alors se disperser les restes malheureux de cette armée qui soixante jours auparavant, maîtrisait la Loire, envahissait le Maine et la Bretagne. La plupart de ces fugitifs allèrent périr dans les champs de Savenay (22-23 décembre 1793).
La fin [modifier]
La Mort de Henri de La Rochejaquelein, peinture de Alexandre Bloch
Cependant la Rochejaquelein, suivi de Stofflet, La Ville-Baugé, de Langerie et d'une vingtaine de soldats qui avaient aussi gagné la rive gauche à Ancenis, fut surpris par une patrouille, qui le chassa des bords du fleuve et dispersa son détachement. Resté avec ses trois compagnons d'armes, il s'enfonça dans l'intérieur du pays, errant la journée entière dans une solitude effrayante, n'apercevant partout que des traces de dévastation et ne rencontrant sur ses pas aucun être vivant. [10] Pendant deux jours, ils ne vécurent que du pain enlevé aux soldats qui tombaient isolément sous leurs coups. À mesure qu'ils pénétraient vers Châtillon, la Rochejaquelein retrouvait de ses partisans. Son unique désir était de combattre encore à leur tête. [11]
Laissant tout au hasard, il traverse de nuit la ville de Châtillon où les républicains avaient un poste, ne répond pas au qui vive de la sentinelle, échappe au péril à force d'audace et, arrivé près de Saint-Aubin-de-Baubigné, retrouve sa tante, madame de la Rochejaquelein, qui était cachée dans une métairie voisine. Il passe trois jours avec elle et n'en reçoit que des paroles pleines de fermeté.
Les ruines du château de la Durbelière, que les républicains avaient livré aux flammes, lui servirent d'asile. Le bruit de son arrivée et quelques indices sur le lieu de sa retraite l'exposèrent aux perquisitions d'un détachement qui vint fouiller ce château : il ne s'y déroba qu'en se tenant couché sur l'entablement des murs encore debout de la façade principale.
C'était ainsi que, bravant les dangers, il préparait tout pour reprendre les armes. Instruit que Charette vient d'entrer dans le haut Poitou, il se porte à sa rencontre, voulant concerter avec lui les opérations qu'il médite. [12]
C'était au moment même où les républicains réprimaient violemment les troubles dans la Vendée. Le gn commandant l'une des colonnes, eut trois engagements sérieux avec la Rochejaquelein, qu'il ne put entamer. Le chef vendéen, voyant grossir l'orage, se replia sur la fort de Vezin pour s'assurer une retraite. Là, s'étant mis sur la défensive, il fit construire dans la forêt des baraques, où il se cantonna avec ses meilleures troupes, après avoir établi un poste sur la route de Cholet. Instruit de tous les mouvements de l'ennemi, il revint au même plan qu'on avait suivi pendant son absence et se borna, pendant le reste de l'hiver, à couper les communications des républicains, à enlever leurs patrouilles, leurs escortes et surtout leurs munitions. Il s'empara ainsi de plusieurs convois. Dans une rencontre imprévue, il prit un adjudant général sur lequel il trouva l'ordre de donner des sauf-conduits aux paysans vendéens, de se saisir ensuite de tous ceux qui en seraient porteurs et de les fusiller indistinctement. La Rochejaquelein se hâta de faire afficher cet ordre barbare dans toutes les paroisses environnantes. Les paysans indignés, n'ayant plus aucune sûreté, se réunirent à lui en plus grand nombre. Se voyant en état de sortir de la forêt, il reparaît à la tête d'un rassemblement et menace tour à tour les divers cantonnements qui l'environnent. Serré de près par le général Cordelier, il élude d'abord le combat, assaillit ensuite ce général à plusieurs reprises et obtient quelques succès. Bouillant et impétueux, il harcèle sans cesse son ennemi, qu'il tient en échec. [13]
Depuis sa rentrée dans la Vendée, il semblait pressentir la chute de son parti et ne pas vouloir lui survivre. Le 4 mars, Nuaillé près Cholet fut témoin de sa dernière expédition. La garnison de Cholet étant sortie pour incendier ce bourg, la Rochejaquelein l'attaqua au moment où elle y mettait le feu. Entourés par les Vendéens, plusieurs soldats périrent dans les flammes ; d'autres s'élancèrent à travers les rangs ennemis. [14]
La Rochejaquelein, qui s'avance à cheval, veut les interroger, malgré les représentations des officiers de sa suite, qu'il laisse derrière lui. L'un des deux grenadiers [15], qui vient d'entendre prononcer le nom du général royaliste, se dévoue ; et, tandis que la Rochejaquelein se penche pour recevoir de lui son arme, le grenadier l'ajuste et tire à bout portant. La balle frappe le front de la Rochejaquelein, qui tombe et expire aussitôt (le 28 janvier 1794). Ses officiers accourent et le vengent en massacrant son meurtrier.
La tombe [modifier]
Le corps de la Rochejaquelein fut enseveli à la même place où il avait été atteint d'un coup mortel. Afin que son cadavre ne soit pas identifié, son compagnon Nicolas Stofflet lui enleva ses vêtements et lui taillada le visage à coups de sabre en sanglotant: j'ai perdu ce que j'avais de plus cher au monde.
Il fut inhumé plus tard après qu'un métayer aura indiqué le lieu de sépulture provisoire, dans l'église de Saint-Aubin de Baubigné dans les Deux-Sèvres, avec ses deux frères: Louis et Auguste du Vergier de La Rochejaquelein.
Le Héros de la Vendée [modifier]
Les royalistes et les républicains donnèrent des regrets à la mémoire de ce héros de la Vendée. Henri de la Rochejaquelein était d'un tempérament robuste ; il maniait un cheval avec grâce ; il était passionné pour la chasse et les exercices violents ; il avait l'oeil vif, le nez aquilin, la mine guerrière ; il semblait né pour les combats. À peine âgé de vingt ans, il montrait le germe de tous les talents de l'homme de guerre. Dans les conseils, il ouvrait toujours l'avis le plus sage, mais il était trop modeste pour ne jamais s'en prévaloir au contraire, il cédait volontiers à l'opinion des chefs dont la maturité semblait annoncer plus de lumières et d'expérience. [16] Mais, dans les dangers, tous recouraient à lui, tous réclamaient ses ordres. N'ayant d'autre instinct que celui de la guerre, il fut étranger à la politique ; et, tel que nos anciens preux, il semblait appartenir aux temps héroïques de la chevalerie. Hors des combats, il s'abandonnait à l'enjouement et à la gaieté de son âge, ne développant son grand caractère que dans les moments décisifs. Sa physionomie était pleine de douceur et de noblesse. Ses yeux, naturellement vifs, devenaient si ardents et si fiers au milieu des combats que son regard semblait alors le coup d'oeil de l'aigle. Tel fut cet illustre chef, à vingt-deux ans généralissime d'une armée qui venait d'être créée, et remportant en dix-huit mois seize victoires dans les circonstances les plus difficiles où une armée puisse se trouver.
Notes et références [modifier]
Ce fut alors que, s'éloignant de la capitale, il dit :
« J'irai dans ma province, et bientôt l'on entendra parler de moi. »
« L'honneur m'appelle, s'écrie le gentilhomme vendéen, et je vole aux combats ! »
Il était déjà même à cheval, lorsqu'il vit arriver plusieurs cavaliers bride abattue, s'annonçant aux cris de Vive le roi ! C'était la Rochejaquelein qui, mettant pied à terre, s'élança dans les bras de son ami en criant : « Je vous ai donc délivrés ! »
Quand la Rochejaquelein jeta les yeux sur ces immenses trophées : « Savez-vous, dit-il à l'un de ses officiers qui le voyait pensif, quel est celui qui est le plus étonné de nos succès? » Comme on hésitait à lui répondre : C'est moi ajouta-t-il.
Il donnait ses ordres dans un chemin creux, lorsque des tirailleurs, s'avançant sur lui, le frappèrent d'une balle qui lui cassa le pouce ; il tenait un pistolet, et sans le quitter, il dit à ceux qui, le voyant couvert de sang, témoignaient de l'inquiétude : Je n'ai que le pouce cassé ! Toutefois, il resta sur le champ de bataille ; mais sa blessure le força de quitter l'armée le lendemain.
«Cette armée de la Haute-Vendée, dit M. de Chateaubriand, jadis si brillante, maintenant si malheureuse, se trouvait resserrée entre la Loire et l'armée républicaine qui la poursuivait. Pour la première fois, une sorte de terreur s'empara des paysans ; ils apercevaient les flammes qui embrasaient leurs chaumières et qui s'approchaient peu à peu; ils ne virent de salut que dans le passage du fleuve. En vain les officiers voulurent les retenir; en vain La Rochejaquelein versa des pleurs de rage, il fallut suivre une impulsion que rien ne pouvait arrêter. Vingt mauvais bateaux servirent à transporter sur l'autre rive de la Loire la fortune de la monarchie. On fit alors le dénombrement de l'armée ; elle se trouva réduite à 30,000 soldats; elle avait encore 24 pièces de canon, mais elle commençait à manquer de munitions et de cartouches.
Aussi modeste que brave, il s'était dérobé aux regards de l'armée. On le cherche, on le trouve, les yeux mouillés de larmes, protestant qu'il ne se croit pas digne du généralat ; qu'il n'a ni assez de talent, ni assez d'expérience pour remplir des fonctions à la fois si honorables et si difficiles ; que ce n'est guère à vingt ans qu'on peut tour à tour présider aux combats et aux conseils avec la même fermeté ; mais l'armée entière, ne songeant qu'aux qualités héroïques de la Rochejaquelein, le proclame. Il parcourt aussitôt toute la ligne, qui fait entendre les cris répétés de Vive le roi ! Vive la Rochejaquelein !
La Rochejaquelein paraissait à la tête de l'armée, monté sur un cheval que les paysans avaient surnommé le Daim, à cause de sa vitesse.
Déjà au milieu du fleuve, il tenait par la bride son cheval qui le traversait à la nage : le batelet, sans direction, flotte, s'enfonce, revient sur l'eau et, après une demi-heure de lutte contre le courant, parvient enfin au bord opposé, au moment où l'armée, qui arrivait successivement, commençait à construire des radeaux pour tenter aussi le passage.
Après vingt-quatre heures d'anxiété et de fatigues, ils parvinrent à une métairie habitée. Là on les accueille ; le fermier leur offre un repas frugal. A peine ont-ils pris quelque nourriture, que, cédant à l'irrésistible besoin du repos, ils se jettent tout habillés sur une meule de paille. Bientôt leur hôte accourt les avertir de l'approche d'une patrouille et les conjure avec instance de fuir au plus vite :
« Ami, lui répond la Rochejaquelein, lors même que nous devrions périr ici, on ne nous arracherait pas au sommeil qui nous accable et qui nous est encore plus nécessaire que la vie. Retire-toi et laisse à la Providence le soin de notre conservation. »
Les républicains survinrent et, accablés aussi de fatigue, s'endormirent auprès des quatre Vendéens, de l'autre côté de la meule. A la pointe du jour, la Rochejaquelein, éveillé par ses trois compagnons d'armes, s'éloigne en toute hâte et, s'enfonçant avec eux dans les bois, se dérobe à l'ennemi.
Tourmenté du souvenir amer de la défaite du Mans, de la fatale et récente séparation de son armée, il était abîmé de désespoir et ne cherchait que les occasions de mourir les armes à la main.
Mais, peu content de l'accueil de ce chef, qui, le quittant, lui dit : Je pars pour Mortagne ; si vous voulez me suivre, je vous ferai donner un cheval. - Moi vous suivre, répond fièrement le généralissime de la Vendée, sachez que je suis accoutumé à être suivi moi-même, et qu'ici, c'est moi qui commande. En effet, 800 Vendéens abandonnèrent le même jour le chef du bas Poitou et reconnurent la Rochejaquelein pour leur général.
Ce jeune guerrier, qui, après la défaite du Mans, s'était écrié :
« Que ne suis-je mort au champ d'honneur ! »
s'était souvent battu en capitaine expérimenté dans les combats précédents mais navré de la malheureuse issue de l'expédition d'outre-Loire, il ne montrait plus que la témérité d'un soldat.
La Rochejaquelein les poursuivit avec acharnement ; et, voyant derrière une haie deux grenadiers qui échappaient à sa cavalerie :
« Rendez les armes, leur dit-il : je vous fais grâce. »
Tous deux se jettent à genoux comme pour l'implorer.
Au nombre de ces derniers se trouvait un grenadier qui, désespérant d'échapper à la cavalerie, s'était caché derrière un buisson; on le fit remarquer à La Rochejaquelein : Voilà un bleu, dit-il, que je veux voir de plus près. Le grenadier se voyant découvert, avait déjà mis en joue un cavalier du groupe qui s'avançait vers lui, lorsque, entendant nommer le général, il changea la direction de son fusil et ajusta l'imprudent qui continuait d'avancer. Au moment où la Rochejaquelein allait saisir le grenadier, celui-ci lui fit sauter la cervelle et tomba presque aussitôt percé de coups. Une fosse fut creusée sur le lieu même, et l'on y jeta les deux cadavres.
« Décidez, disait-il, et j'exécuterai. »
Source partielle [modifier]
« Henri de La Rochejaquelein », dans Charles Mullié, Biographie des célébrités militaires des armées de terre et de mer de 1789 à 1850, 1852 [détail é](Wikisource)
« Henri de La Rochejaquelein », dans Louis-Gabriel Michaud, Biographie universelle ancienne et moderne : histoire par ordre alphabétique de la vie publique et privée de tous les hommes avec la collaboration de plus de 300 savants et littérateurs français ou étrangers, 2e édition, 1843-1865